Des filets peu garnis

  • Imprimer

La tradition perdure au col des Palombières à Lantabat en Pays Basque, malgré la proximité de la route communale

Dans son excellent ouvrage « Encyclopédie de la palombe » un titre qui n'est pas usurpé , Jacques Luquet prouve que l'origine des filets de chasse à la palombe de Lantabat remonte au moins à la fin du XVIe siècle. C'est dire si les quinze chasseurs qui y officient chaque automne perpétuent une tradition ancestrale. « Mais cette chasse avait disparu et mon père et d'autres associés l'avaient remontée en 1920 », précise l'Hazpandar Pierre Trolliet, copropriétaire actuel des filets avec deux membres de sa famille, Georges Trolliet et René-Jean Trolliet. Et avec la famille Harymbat de Saint-Jean-Pied-de-Port. « Notre territoire s'étend sur trois communes : Lantabat, Suhescun et Ainhice-Mongelos. Nous sommes propriétaires de quelques hectares et nous louons le reste .»


Une route au milieu. La première chose qui frappe le visiteur est la route qui franchit le col juste sous les filets. Un bénévole y fait d'ailleurs office d'agent de la circulation ! « La spécificité de cette chasse, c'est qu'elle se fait sur un col où passe naturellement la migration. Nous n'avons pas besoin de dévier les palombes. Mais nous souffrons quand même d'une faible altitude, car nous ne sommes qu'à 330 mètres », ajoute Pierre Trolliet. Mais un coup de sifflet retentit, qui annonce un premier vol en ce samedi matin. Les spectateurs se cachent, les xatar (ou rabatteurs) officient en agitant leurs draps blancs pour pousser la palombe, les lanceurs de palette aussi, qui font fondre le vol vers les filets. Mais cette fois encore, la prise sera maigre. « Nous avons fait un bon début de saison mais depuis une semaine nous devons nous contenter de peu », regrette Pierre Trolliet. Perché sur son pylône, le capitaine de chasse siffle plusieurs fois. Mais rien à faire, la palombe est trop capricieuse.


De Lantabat à Naphal. Puis vient le calme plat, propice à la discussion. Les visiteurs ne manquent pas en ce week-end de la Toussaint. A défaut de palombes, les conseillers généraux Jean-Louis Caset et Barthélémy Aguerre, les maires Lucien Delgue (Armendaritz) et Arño Berrogain (Ordiarp) sont de passage. Mais c'est avec le dernier que s'attarde Pierre Trolliet. Et pour cause ! A cause d'un conflit qui l'oppose à la commune de Musculdy, la municipalité d'Ordiarp a décidé de ne pas ouvrir les filets de Naphal cette année. « Nous avons eu le même problème avec une commune, sourit Pierre Trolliet. En 1983, nous n'avons pas chassé. Et en 1984, nous avons repris mais en supprimant le tir au vol (1) derrière les filets. Depuis, nous faisons de bien meilleures chasses ! ». Une solution qu'adopterait bien Arño Berrogain, s'il le pouvait. « Si vous voulez, je viens en médiateur », propose le patron de Lantabat, qui est également président de l'association des filetiers. « Déjà que nous ne sommes que dix (2) et que nous ne pesons pas lourd, il ne faut pas que Naphal disparaisse ! », espère ardemment Pierre Trolliet.
(1). Le tir au vol derrière les filets de Naphal est à l'origine du conflit qui a éclaté entre les communes d'Ordiarp et de Musculdy. (2) Echalar (sur la frontière de Sare), Sare, Béhorléguy, Lantabat, Les Aldudes, Lecumberry, Gatagorena et Naphal (Ordiarp), Osquich, Lanne-en-Barétous