IRATY. Les chasseurs des tirs au vol des crêtes de Soule attendent toujours les grands passages

IRATY. Les chasseurs des tirs au vol des crêtes de Soule attendent toujours les grands passages

Un si cher désir de palombes

«Regardez, elles sont juste en face, au-dessus d'Arratzolatze. Elles arrivent, elles seront peut-être pour nous. Non, elles vont sur Millagate, dommage ! », commente Alain Auriol, chasseur à Sensibil. Un des nombreux postes de chasse de tir au vol qui, chaque année, fleurissent sur les crêtes de Larrau à Iraty.

Alain Auriol arrive de Lavaur et chasse dans l'équipe d'André Labeyrie, sur ce col acquis aux enchères en mai dernier, lors des adjudications triennales. Celles-ci sont organisées par la Commission syndicale de Soule, gestionnaire des lieux au nom des 43 communes qui la composent. Une collectivité dont un tiers des recettes provient de cette manne qui s'est élevée cette fois à près de 250 000 euros. Pourtant, la très mauvaise chasse de l'année précédente et la crise économique qui s'y ajoutait faisaient craindre le pire. Mais cette fois encore, la « palombite aiguë » l'a emporté.

L'ambiance et le folklore

« Il y a vingt-cinq ans que je viens », raconte le Dacquois André Labeyrie, l'adjudicataire des postes de Sensibil. Là, on arrive à 90 palombes depuis le début. Avant, on en faisait parfois autant en une demi-journée les bonnes années. C'est fini », regrette-t-il. Il n'a pourtant pas hésité à débourser 12 000 euros pour revenir sur ces cols, comme chaque fois. « J'ai une maison à Larrau et j'aime rentrer tous les soirs. Et il y a l'ambiance avec les copains. Tout le reste, c'est du folklore ! » s'exclame-t-il.

« Nous voulions faire baisser les prix (les adjudications se font aux enchères descendantes, NDLR) mais au moment venu, nous avons pris Odixarreko pasia à 18 000 euros, alors que nous l'avions eu à 17 500 euros les trois années précédentes. On s'y plaît et on y a fait du boulot, alors on n'a pas voulu prendre le risque de le laisser aux autres », confirme de son côté Jean-Michel Bordenave, fidèle parmi les fidèles.

« Triiitt !! », un coup de sifflet l'interrompt et tout le monde se cache derrière les postes dressés pour la circonstance. De simples cabanes sans toit, à moitié enterrées et bien camouflées, avec des regards pour scruter l'horizon et l'arrivée de l'oiseau. Toute la crête est ainsi parsemée de positions de chasse dressées les unes après les autres sur ce couloir de migration autrefois très couru.

Quinze jours sans migration, puis des températures de -6° : les premiers jours furent difficiles. Quatre bonnes matinées de chasse ont succédé dès que le beau temps est revenu à la mi-octobre. Puis la pluie a refait son apparition et ce n'est que lundi dernier que la migration a repris. « On avait un bon vent et on a fait une bonne chasse. On pensait que c'était reparti mais le vent a tourné et on n'a pratiquement plus rien vu malgré le temps superbe qu'on a eu toute la semaine », commente Jean-Michel Bordenave. « Il n'en est passé qu'un peu plus d'un million sur tout le Pays Basque. Il en reste encore derrière. Il y a toujours espoir », pense toutefois André Labeyrie.

Même les Corses

En attendant, les chasseurs ont le temps de papoter. « Pour le tir au vol, il faut viser la palombe et « swinguer » en avant pour tenir compte de la vitesse de l'oiseau et de celle du vent », décrit Alain Auriol.

Plus haut, Vincent Deyres, originaire de la région, arrive de Corse. « Je suis restaurateur à Calvi. Là-bas, la chasse à Iraty, c'est un mythe. En 2004, j'ai invité des chanteurs corses ici. C'était une bonne année. Ils en parlent encore ! », affirme le maître queux. « Je ne manquerais cette chasse pour rien au monde », poursuit-il. « Évidemment, c'est un peu dommage de vivre avec ses souvenirs. Mais j'aime ce pays, j'aime la vie. Et voyez ce paysage ! Je suis un épicurien. Il n'y a pas d'oiseau cette année ? Eh bien, il y en aura l'an prochain ! »

Visiblement, à défaut de palombes, un vent d'optimisme souffle encore sur les crêtes d'Iraty...

 

Auteur : marcel BEDAXAGAR