Elles se font attendre !

Les filets d'Echalar existent depuis le XIIIe siècle. Avec une particularité due à leur position frontalière : les pantières se trouvent en Navarre espagnole mais le rabat des volées se fait en France

:Marcel Bedaxagar

 

 


 


 
 
 


 

Mais que sont-elles devenues ? Les palombes auraient-elles disparu ? Que nenni : tous les chasseurs en sont persuadés, la migration a du retard et le gros des troupes va arriver, comme d'habitude. C'est dans cet espoir que douze hommes montent tous les jours aux pantières d'Echalar, en Navarre espagnole, juste derrière les crêtes de Sare. Mais hier matin, les chasseurs se sont mués en maçons, pour faire une fontaine à partir d'un vieil abreuvoir en pierre. Histoire de passer le temps. « Il y a trop de vent, nous ne pouvons pas monter les filets, ils seraient détruits. Et hier, c'était pareil », se désole Gerardo Damborenea, porte-parole du groupe.


Frontière abolie. Ce repos forcé permet au moins à Gerardo de parler de ces pantières d'Echalar, sans doute les plus anciennes de toutes. « La palombière d'Echalar devait donner tous les ans 24 palombes vivantes pour le Premier de l'An », dit en effet un écrit daté de 1378 ! Jacques Luquet, qui cite ce fait dans sa remarquable « Encyclopédie de la palombe », s'arrête également sur la grande particularité de ces pantières. « Le rabat des volées de migrateurs se fait en France, sur le territoire de la commune de Sare, et les filets sont en Espagne », observe-t-il. Navarrais et Labourdins avaient donc aboli les frontières avant l'heure !
« Nous chassons depuis le 1er octobre et au moins jusqu'au 20 novembre, poursuit Gerardo Damborenea. Cette année, c'est maigre pour l'instant, nous avons pris moins de 100 palombes ! ». Un chiffre qui laisse rêveur si on le compare aux belles années. « En 44, ils en ont pris 17 000, c'est le record absolu. Mais en 70, nous en avions 4 500. Puis ça a baissé : 2000, 1000, 600 l'an dernier », compte-t-il un brin dépité. Alors, Echalar essaie d'innover, en organisant des visites guidées de ces pantières.


Le tir au vol. Propriétaire de cette chasse, l'architecte et châtelain Jaime Gaztelu a demandé à la jeune Laura Elizagoien, petite fille de chasseur aux filets, de guider ces visites. « Je leur fais d'abord un commentaire sur cette façon de chasser, puis je leur projette un film réalisé par une télé locale et qui montre très bien toute la chasse. Enfin, je leur fais visiter les pantières », résume Laura.
Pour ce lundi, la visite s'arrête à la projection du film, faute de passages. Pourtant, des coups de fusil se succèdent : ceux des tireurs au vol qui s'étendent sur la crête et que Gerardo Damborenea ne voit pas d'un très bon ?il. « Mais c'est la commune d'Echalar qui vend ces postes aux enchères tous les ans », soupire-t-il. Près de lui, un filetier sourit : Patxiku Irissari n'est autre que le maire d'Echalar, un village de 800 âmes !

 

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