Les vols bleus de Saint-Luc ne sont que passés

Un beau début de migration en ce jour de grand truc, mais des oiseaux difficiles à poser et des surprises à la clé. Récit

Après une fin de semaine cauchemardesque sur le plan météorologique, dimanche matin, le soleil refaisait une apparition. La journée s'avérait même des plus belles. Le beau temps laissait naître l'espoir de voir se relancer la migration de l'oiseau bleu. D'ailleurs, dès les premières lueurs du jour, quelques grives musiciennes s'envolaient en lisière de vignes. Preuve intangible d'un passage nocturne. Au fur et à mesure que la matinée s'avançait, quelques autres par bandes de trois, quatre ou cinq étaient régulièrement observées. Mais de palombes, toujours pas ou vraiment très peu. L'espoir était pourtant là, si peu que pareilles conditions météorologiques se maintiennent quelques jours, le grand voyage vers la péninsule ibérique n'allait pas tarder à s'amorcer. La Saint-Luc allait peut-être pour une fois tenir ses promesses. Les derniers vols avant la nuit venant accréditer cette thèse. 


Beaucoup de grives. Lundi matin, le grand jour est enfin arrivé. L'aube pointe à peine ses premières lueurs que les appeaux sont déjà installés. Comme la plupart de ses confrères paloumayres, François est au poste dans sa cabane de l'Entre-deux-Mers. Les invités n'arriveront qu'un peu plus tard. Le jour se lève lentement et les premiers coups de fusils se font entendre au loin dans le vignoble. « Des grives ont dû passer cette nuit », pense le chasseur. Les heures qui vont suivre vont lui donner raison. Au début, quelques musiciennes éparses, puis des bandes de mauvis. A partir de la mi-matinée, la migration s'amplifie pour devenir quasiment incessante. Quant aux palombes, mis à part un ou deux vols, elles ne sont pas de la partie. Par contre, du côté de Savignac, sur la palombière d'un des amis de François, la migration est lancée. 
Celui-ci vient à peine de raccrocher le téléphone qu'un volier de plusieurs centaines d'oiseaux se présente pleine chasse. Branle-bas de combat à l'intérieur. Pas un coup d'aile. La palombe s'annonce dédaigneuse aujourd'hui. Les vols suivants le confirmeront. Et toujours des grives. 


« Un train bleu ». Nouveau coup de téléphone. Cette fois-ci, c'est Bertrand, parti chasser dans un col pyrénéen. « Hier, il y en avait plein le piémont et aujourd'hui, c'est un train bleu. Ca passe sans arrêt. Je crois qu'on ne va même pas avoir le temps de redescendre manger », apprend celui-ci. 
Le portable n'arrête pas de sonner. « A Savignac, elles commencent à poser », annonce François, visiblement contrarié de voir de nombreux vols passer de part et d'autre de son installation. « Les vents ne doivent pas nous être favorables », poursuit-il. Hormis trois ou quatre salves, chez les voisins, cela ne semble guère mieux. Les palombes n'ont pas envie de poser, quand soudain deux oiseaux arrivent. Coup de semeyrères. L'un d'entre eux décroche et se pose de l'autre côté de la palombière. François s'y rend et met une bonne vingtaine de minutes avant d'apercevoir l'oiseau. Alors, il monte tout doucement le fusil à l'épaule, vise longuement, appuie sur la détente. Un petit clic se fait entendre. François avait oublié de charger son fusil. Dommage, car c'est la seule palombe à s'être posée ce jour de grand « truc ».